L'amour d'une Mère ☾ ft Lilith Blackrain

L'amour d'une Mère

22 DÉCEMBRE 2018

Debout sur le rebord de ma fenêtre, je m’apprête à m’envoler vers le Fangtasia, aux pieds de ces falaises d'où surplombe mon manoir. Mais je prend un instant pour contempler l’horizon. Le couché de soleil est absolument magnifique, le ciel flamboie de rouge, de violet et d'orange vif. Les nuages semblent s'embraser dans ces couleurs de déclin. Il me semble revoir le paysage parti en fumée dans l'incendie de la veille. Quelle ironie. Un spectacle qui lui, n’avait rien d’admirable je le conçois. Cela avait été le résultat d’un combat acharné entre les sorciers bénéfiques et les démons. La nuit dernière, La Source avait enfin réussi à ouvrir la Porte des Enfers, entamant les hostilités sans attendre, accompagné de quelques sbires échappés à leur tour. D’autres sorciers maléfiques ou démons qui étaient déjà à la surface, avaient abandonné tout ce qu’ils faisaient pour rejoindre ses rangs. Bien que je ne souhaitais aucunement prendre parti pour l’un ou l’autre camp, J’étais tout de même tenue par une alliance avec Francesca, la jolie petite princesse des Ténèbres, qui proposait notamment que je lui concède quelques soldats pour cette fameuse attaque. Un deal est un deal, je lui avais donc accordé une dizaine de jeunes vampires, ceux qui avaient une soif insatiable de combattre. Ils n’étaient pas les meilleurs pour être envoyé au front, mais ce n’était pas pour moi qu’ils allaient se battre. Alors leur fougue était suffisante. J’avais assisté de loin, sous ma forme animale, à ce grand retour. N’observant que les premiers instants de ces hostilités. A mes yeux cela ressemblait plus à une pagaille qu’une réelle bataille. Les rangs semblaient désorganisés, il n’y avait pas de cohérence dans les attaques menées. Je ne fus donc pas étonnée de l’issue finale. La Source a été vaincue. Même si Francesca venait de perdre son père, je me disais que c’était un mal pour un bien. Prétendante légitime pour le trône, son règne me semblait plus adéquat pour entamer de nouvelles discussions quant aux termes de notre Alliance. Je saute enfin dans le vide, me changeant en chauve-souris en plein vol et virevolte droit vers le club en contrebas. Je reprend mon apparence humaine à l’orée du bois et me dirige vers l’entrée des Immortels qui semble plus abondante qu’à l’ordinaire. Certainement dû aux récents événements. Comme à l’accoutumée, c’est Nikolaï qui vient à ma rencontre, tendant son bras pour que m’y accroche. Le chemin s’ouvre devant nous, la foule s’écarte, on me salue. Mon Général m’informe alors des remontées de la vieille, des partisans venus trouver refuge dans le club, de la petite poignée de vampires revenue du combat, des ragots sur le fait que Francesca ne s’était pas encore imposée comme nouvelle Reine. Il me fait aussi un compte rendu sur les pertes, dans les deux camps, sur les blessés graves qui avaient un lien avec nous. Et, malgré les nouvelles quelques peu ternes, il trouve le moyen d’agrémenter son discours d’une petite plaisanterie sur la mort consternante de La Source. D’abord, parce que, tout comme moi, il ne le portait pas dans son cœur, nous ne faisions plus parti de ces sbires et n’avions donc aucunement l’intention de s’allier à lui et encore moins de se trouver affligé de sa perte. Ensuite, parce que le soldat et fin tacticien qu’il est, ne pouvait s’empêcher de constater le manque de coordination dans son plan, concluant plus sérieusement que son ingérence dans cette bataille fut cause de sa perte. J’acquiesçais et le suis ensuite à l’étage, dans son bureau pour discuter plus discrètement sur d’autres affaires en cours.

Nous avions à peine échangés quelques mots que l’on frappe à la porte, m’annonçant l’arrivée de la Doyenne des Nymphes. M’étonnant de sa présence au sein de mon club, je m’empresse de descendre la rejoindre. Je sais qu’elle sera bien traitée, mes enfants ont tous connaissance de notre lien particulier avec ces créatures de la Nature et depuis ces deux centaines d’années, aucun écart de conduite n’a été relevé ni chez elles, ni chez nous. Je me demande si la raison de sa venue est liée à la petite bataille d’hier et de ses conséquences quelques peu désastreuses. Pour un peuple comme le sien, vivant en harmonie avec leur environnement, respectueuses des êtres qui l’habitent et protectrices des milieux naturels, le spectacle désolant des forêts en feux a dû l’accabler profondément. En voyant la Doyenne au centre de la pièce, ce n’est pas la foule qui s’est arrêtée de se mouvoir tout en l’observant qui attire mon attention, mais plutôt celle de la jeune vampire qui se tient juste derrière elle, Louisiana, celle qu’on venait justement de me signaler comme morte au combat et qui pourtant semblait bien vivante, si je puis dire. Je reporte toutefois mon attention vers la Nymphe qui se dirige vers moi, lui souriant sincèrement alors qu’elle me salue. « Bonsoir, Lilith. »  « Amethyste » « Je suis désolée de venir te déranger chez toi. Mais il faut que je te parle. »  Le ton de sa voix est calme et doux, m’intriguant davantage. « Tu es toujours la bienvenue ici, je t’écoute, de quoi s’agit-il ? » Elle me désigne la jeune vampire avant de reprendre la parole. « Ton Enfant a été laissé pour mort dans ma forêt. » Inquiète de ces propos, je pose aussitôt mes yeux vers la petite Louise qui, par son regard, me confirme cette triste nouvelle. « Elle était très mal en point, ma sœur l'a soignée comme elle le pouvait. » Je ferme les yeux, une main sur ma poitrine, en guise de remerciement, avant de les rouvrir à l’entente de la suite de son discours « Je lui ai donné un peu de mon sang pour qu'elle ne meurt pas. Elle était inconsciente, ne la blâme pas pour ça, c'était ma décision. » Je ne cache pas mon étonnement, d’autant que très peu de gens savent de quoi il retourne. Je réalise toutefois que, bien qu’une partie de notre entente est de, justement ne point se nourrir du sang d’une Nymphe, Amethyste l’a tout de même fait pour le bien de mon Enfant. Cela me fait plaisir et au fond, ne m’étonne pas, sa bonté est sincère et ses intentions sont loin d’être à double sens. En général, elle n’agit que pour le Bien. « Je te remercie, sincèrement » commençais-je, en prenant ses mains dans les miennes. « De savoir qu’elle eut été auprès des tiens me réconforte malgré tout. Elle a été chanceuse dans son malheur » A cette phrase, je regarde Lousiana et lui sourit doucement alors que Tessa l’attrape par les épaules pour l’attirer contre elle. D’autres se joignent à ce câlin réconfortant et je leur fais alors signe qu’ils peuvent s’en aller. Ils n’attendaient d’ailleurs que mon signal pour se précipiter à l’étage qui nous est réservé, certainement pour lui prodiguer un soin plutôt mental que physique et peut-être même l’asséner de questions. Niko me fit un signe de la tête, suivant d’emblée les autres. Je le sais, il saura gérer la situation. Quant à moi, j’attire la Doyenne dans l’une alcôve VIP pour plus d’intimité. « Viens… Assieds-toi » je lui relâche les mains et m’installe sur le grand fauteuil arrondi autour de la table. Alors qu’on referme les rideaux derrière nous, je porte mon attention vers la Nymphe qui semble bien épuisée et dont l’attitude me porte à croire qu’elle ne m’a pas informée de toute l’histoire, que le plus dur semble à venir. « Amethyste, tu peux tout me dire, qu’y a-t-il ? » « Nous sommes assez certaines que ta Fille a été torturée. » Bam. Si certaines personnes doutent de l’existence de mon cœur, je puis vous dire qu’à l’entente de ce mot, il sembla bondir hors de ma poitrine, me prouvant fortement qu’il est bien présent au creux de ma cage thoracique. J’essaie de garder mon calme alors que j’écoute la suite de ses propos, mais mon esprit fulmine déjà. « J'ignore par qui, mais je crois que ce n'était que pure cruauté gratuite. Elle a été laissée dans un endroit dégagé, certainement pour que le soleil termine le travail. Je n'ose imaginer ce qu'elle a dû subir... »  Sa voix tremble, la mienne s’éteint, je ne peux prononcer aucun mot à cet instant. Mes poings se resserrent vivement, jusqu’à enfoncer mes ongles dans ma chair. J’enrage. Ma pauvre enfant. Subir de telles atrocités avant d’être laissée pour morte. Que devait-elle ressentir, toute seule, alors que sa vie la quittait, laissant place à un froid glacial. Je m’en veux, je n’aurais pas dû l’envoyer à ce combat alors qu’elle est encore si jeune. Elle n’était certainement pas préparée à la vue de tout ce sang sur le champ de bataille, peut-être que l’excitation ne lui avait pas permis d’utiliser pleinement ses capacités… qu’elle n’a pas pu se défendre.. Non.. ce n’est ni de sa faute, ni la mienne. Si je dois blâmer quelqu’un ce sera l’auteur de ce crime. Cette pensée m’anime d’une certaine force apaisante, je relâche enfin la pression sur mes mains et voit rapidement mes paumes cicatriser. Confuse de ce sang qui a coulé sur la table, devant mon invitée, j’attrape une serviette et nettoie aussitôt les tâches écarlate. « Je m’excuse pour ça, j’ai perdu… le... contrôle » commençais-je doucement avant de reprendre tout aussi calmement. « Tu disais donc qu’elle aurait été abandonnée en plein soleil… lorsque tu l’a soignée, as-tu remarqué un détail portant à croire qu’il pourrait s’agir là des méfaits d’une.. créature en particulier.. comme des marques de brûlures ou autre ? » mes doigts se mettent à se mouvoir sous l’excitation d’une prochaine vengeance, pianotant dans le vide comme à chaque fois que mon esprit s’aventure à imaginer un plan méticuleux.

Codage par Libella sur Graphiorum